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Salman le Persan (partie 1 de 2) : Du zoroastrisme au christianisme

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2160 2015/05/17 2024/12/08

Le compagnon du prophète Mohammed (que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui), Salman al-Farisi (Salman le Persan), raconte[1]  comme suit son cheminement vers l’islam :

« J’étais un Persan de la région d’Ispahan[2], plus particulièrement d’une petite ville nommée Jayi, dont mon père était le maire.  J’étais, à ses yeux, la créature de Dieu qui lui était la plus chère.  Son amour pour moi était si grand qu’il me permettait de surveiller le feu[3]  qu’il allumait et qu’il s’assurait de ne jamais laisser mourir.

Mon père possédait une vaste terre fertile.  Un jour, alors qu’il était occupé par des travaux de construction, il me demanda d’aller sur sa terre et d’y remplir une tâche qu’il m’expliqua.  En chemin, je passai près d’une église chrétienne et j’y entendis des gens prier, à l’intérieur.  Je n’avais aucune idée de la façon dont certaines personnes vivaient, en dehors de chez moi, car mon père me gardait toujours à la maison.  Alors quand j’entendis les voix des gens qui priaient, ma curiosité l’emporta et j’entrai dans l’église pour les observer.

Lorsque je les vis, leur façon de prier me plut et je voulus en savoir davantage sur leur religion.  Je me dis, en moi-même : « Par Dieu, cette religion est meilleure que la nôtre. »  Par Dieu, je ne pus me détacher d’eux qu’à la tombée du jour.  Avant de partir, je leur demandai :

 « D’où vient votre religion? »

Ils me répondirent : « D’al-Shaam. »[4]

Je retournai chez mon père qui, s’inquiétant pour moi, avait envoyé quelqu’un me chercher.  Lorsque je fus de retour, il me dit : « Ô mon fils!  Où étais-tu?  Ne t’avais-je pas confié une tâche? »

Je dis : « Mon père, j’ai croisé sur mon chemin une église dans laquelle priaient des gens et j’ai aimé leur religion.  Par Dieu, je suis resté avec eux jusqu’à la tombée du jour. »

Mon père me dit : « Mon fils!  Il n’y a rien de bon dans cette religion; ta religion, qui est celle de tes ancêtres, est meilleure. »

Mais je répondis : « Non, par Dieu : leur religion est meilleure que la nôtre. »

Mon père me menaça, puis m’enchaîna les pieds et me garda prisonnier de sa maison.  Je réussis à envoyer un message aux chrétiens leur demandant de me tenir au courant si une caravane commerciale chrétienne en provenance d’Al-Shaam venait à passer par la ville.  Lorsqu’une telle caravane arriva, ils m’en informèrent.  Je leur demandai alors de m’avertir une fois que les gens de cette caravane auraient terminé leurs échanges commerciaux et s’apprêteraient à retourner chez eux.  Ils m’informèrent donc de leur départ imminent.  C’est alors que je me libérai des chaînes qui entravaient mes pieds et que j’embarquai avec la caravane jusqu’au Shaam.

Lorsque j’arrivai à destination, je demandai : « Qui est la meilleure personne parmi ceux qui suivent votre religion? »

On me répondit : « L’évêque.  Il est dans l’église. »

J’allai le voir et lui dit : « J’aime cette religion et j’aimerais rester avec vous, vous servir, dans votre église, pour que je puisse apprendre de vous et prier avec vous. »

Il dit : « Vous pouvez entrer et rester avec moi. »   Alors je me joignis à lui.

     Après quelque temps, Salman découvrit quelque chose au sujet de l’évêque.  C’était en fait une mauvaise personne qui ordonnait à ses fidèles de donner en charité, mais qui gardait tout l’argent pour lui, sans jamais le redistribuer aux pauvres.  Il avait accumulé, jusque-là, sept jarres d’or et d’argent.  Salman poursuit ainsi son récit :

Je le méprisais à cause de ses actions.

Un jour, l’évêque mourut.  Les chrétiens se rassemblèrent pour l’enterrer.  Je les informai alors du fait qu’il était une mauvaise personne qui ordonnait la charité, mais qui gardait tout pour lui, sans jamais en donner aux pauvres.  Ils demandèrent : « Comment sais-tu cela? »

Je dis : « Je peux vous montrer son trésor. »

Ils dirent : « Montre-le- nous! »

Je leur montrai l’endroit où il gardait l’argent et ils en sortirent sept jarres remplies d’or et d’argent.  Lorsqu’ils virent cela, ils dirent : « Par Dieu, jamais nous ne l’enterrerons. »  Alors ils le crucifièrent et le lapidèrent.[5]

Ils remplacèrent leur évêque.  Jamais je ne vis quelqu’un, parmi eux, prier mieux que lui, ni un homme plus détaché des biens de ce monde et si attaché à l’au-delà, ni un homme aussi dévoué à son travail, qu’il accomplissait jour et nuit.  Je l’aimai plus que tous ceux que j’avais aimés jusqu’alors.

Je demeurai avec lui un temps, jusqu’à ce que la mort vienne le chercher.  Alors qu’il était mourant, je lui dis : « Ô, untel, je suis resté avec toi et je t’ai aimé plus que tous ceux que j’ai aimés jusqu’à maintenant.   Maintenant que le décret de Dieu (i.e. la mort) s’approche de toi, à qui recommandes-tu que je tiennes compagnie et que me conseilles-tu? »

L’évêque dit : « Par Dieu!  Les gens courent à leur perte!  Ils ont altéré la religion qu’ils suivent.  Je ne connais personne qui suive encore (correctement) la religion que je suis à part un homme vivant à al-Mousil.[6]  Alors va le rejoindre [et il me donna son nom]. »

Lorsque l’évêque mourut, Salman partit pour al-Mousil et rencontra la personne qui lui avait été recommandée.  Il raconte :

Je dis à cet homme : « [Untel], sur son lit de mort, m’a recommandé de me joindre à vous.  Il m’a dit que vous suiviez la même religion que lui. »  Je restai avec lui et trouvai qu’il était effectivement une très bonne personne et qu’il suivait correctement la religion de celui qui m’avait référé à lui. 

Mais bientôt, la mort vint le chercher à son tour.  Alors qu’il était à l’agonie, Salman lui demanda, comme à l’autre, de le recommander à une autre personne suivant la même religion.

L’homme dit : « Par Dieu, je ne connais personne qui suive correctement cette religion qui est la nôtre à part un homme vivant à Nasibine[7] et son nom est [untel].  Pars à sa rencontre. »  Après sa mort, donc, je partis pour Nasibine. »

Salman y trouva l’homme et resta avec lui quelque temps.  Puis, le même scénario se reproduisit et à la mort de cet homme, Salman alla rejoindre un homme à Amuria.[8]   Là-bas, il trouva son nouveau contact et demeura avec lui.  Durant son séjour, il travailla et « gagna quelques vaches et un mouton. »

Lorsque cet homme se retrouva à l’agonie, Salman lui posa les mêmes questions qu’aux autres, mais cette fois, il reçut une réponse différente. 

L’homme dit : « Ô mon fils!  Je ne connais personne qui suive encore la même religion que nous.  Cependant, un prophète apparaîtra de ton vivant et ce prophète suivra la même religion qu’Abraham. »

Puis, il décrivit ainsi ce prophète : « Il sera envoyé avec la même religion qu’Abraham.  Il sera originaire d’Arabie et émigrera dans un endroit sis entre deux étendues couvertes de pierres noires [comme brûlées par le feu].  Il y a, dans cet endroit, des palmiers un peu partout.  Cet homme peut être reconnu à certains signes.  Il acceptera et mangera la nourriture qui lui sera offerte en cadeau, mais ne touchera pas à celle qui lui sera offerte en charité.  Le sceau de la prophétie sera visible entre ses épaules.  Si tu peux te rendre dans cette contrée, alors fais-le. »



Footnotes:

[1] Al-Haithami a recueilli cette narration dans Majma’ Al-Zawa’id.

[2] Ispahan, ville du Nord-Ouest de l’Iran.

[3]  Son père était un zoroastrien qui adorait le feu.

[4] Al-Shaam: région qui englobe les pays connus aujourd’hui comme le Liban, la Syrie, la Palestine et la Jordanie.

[5] Un point important à souligner, ici, c’est que Salman ne se détourna pas de ce qu’il croyait être la vérité à cause des actions d’une seule personne.  Il ne dit pas : « Regarde-moi ces chrétiens!  Même le meilleur d’entre eux est mauvais! ».  Il comprenait plutôt qu’il devait juger cette religion sur la base de ses croyances fondamentales et non sur ses fidèles.

[6] Al-Mousil: une ville importante au nord-ouest de l’Irak.

[7] Nasibine: ville située entre al-Mousil et al-Shaam.

[8] Amuria: ville qui était incluse dans la partie orientale de l’empire romain.

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