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Second déterminant: La religion

Ce déterminant n' est pas seulement l'un des plus importants qui soient; il constitue en vérité  la  plus  éminente  des composantes  de la  civilisation, et mieux encore de  la vie. Il n’existe pas de communauté sans religion, ce qui prouve qu' elle  est  un  élément  immanent à l'existence  humaine.  L’Islam est venu satisfaire cette immanence et représenter la religion authentique. Dans ce qui suit  nous allons tour à tour définir  le terme de religion, exposer les critères de la religion authentique, justifier le besoin humain de religion et enfin déterminer la source de celle-ci  :

A – Définition :

Définition linguistique et idiomatique du substantif "religion / ad-dîn " :

 Al Fayrouz ،Abâdî  définit ainsi ce substantif : « La religion / ad-dîn, c’est la rétribution. » On dit " dintuhu ", soit :  " je l’ai rétribué",  et  "dintu bih ", soit : "j’ai été rétribué ". Ce substantif polysémique[1] désigne également l’habitude, le culte, les pluies régulières, l’humilité, le fait de rendre des comptes, la coercition et la domination, la prééminence, le pouvoir, la royauté, la puissance, la conduite et la disposition. Il désigne aussi  celui qui rétribue, celui qui prédomine, le juge, le magistrat, l’administrateur, celui qui demande les comptes, celui qui récompense et ne néglige aucune œuvre, qui rétribue  le bien et le mal,  telle cette Parole du Très -Exalté : [ … aurons-nous  vraiment à rendre des comptes ?/a'inna lamudînoun? ] (Sourate Les Rangs, As-Sâffât, 37, Verset 53), ce qui en d'autres termes signifie :  vous serez rétribués et vous aurez des comptes à rendre  au Très-Haut [2] .

Idiomatiquement, selon le sens qu'en  donne  l’Islam :   « Le terme  religion /ad-dîn  désigne l’obéissance et la rétribution;  métaphoriquement, il  désigne la législation. » [3]; telle est ainsi la définition proposée par  Ar-Râghib  dans son ouvrage Al mufradât. Pour Al Fayrouz ،Abâdî  : «  La religion /ad-dîn  est  un terme  générique qui désigne  tout ce par  quoi on  adore Allah Le Très-Haut » [4]. 

 Certains  oulémas  de l’Islam ont défini la religion/ad-dîn comme étant :« Une création divine qui mène les doués de raison saine, et ce, par leur  propre choix,  à ce qui est bon     pour leur vie sur terre et leur garantit le bonheur dans l’Au-delà.»  Dirâz a également dit : « Nous pouvons résumer cela en disant :  (la religion/ad-dîn est) une création divine qui oriente vers le Vrai dans les croyances et vers le  bien dans  les  conduites  personnelles et les relations avec autrui»[5] Ibn Al Kamal définit quant à lui  la religion /ad-dîn  en ces termes : «C’est une  création divine invitant les doués de raison  à  accepter ce qu’apporte le Messager» [6].

 

Voilà quelques définitions de la religion /ad-dîn  d’après les oulémas de l’Islam. Venons-en à présent aux définitions que proposent de ce terme les  érudits  occidentaux, qui varient  et divergent en fonction  de leurs penchants, de leurs croyances, de leur appartenance religieuse et de leurs spécialisations. Les sociologues proposent ainsi une définition différente de celle des philosophes et également distincte de  la définition des idéologues. Nous allons ci-dessous  présenter un ensemble des  définitions  proposées par ces divers spécialistes  pour constater   à quel point elles  sont discordantes.

Le terme est défini  dans le dictionnaire philosophique comme étant « un ensemble de croyances et de pratiques cultuelles sacrées en lesquelles ont  foi les membres d'un  groupe particulier  pour combler aussi bien le besoin de l’individu que celui  de la société. L’émotion est  à  la  base de la religion où  la raison occupe  malgré tout  une place».

Les sociologues occidentaux, quant à eux, définissent la religion  comme  étant  « un système social fondé sur l’existence d’un ou de plusieurs êtres, ou d’une puissance surnaturelle, qui  détermine les rapports de l’homme avec ces êtres ou cette puissance. Cette  idée se cristallise au sein de  n’importe quelle culture pour devenir un mode, ou des modes sociaux, ou encore une organisation sociale. Ce genre de mode  ou d'organisation  sont alors  connus sous le nom de  religion. » [7]                                                                                                                                                                                                                                                                                  

Le professeur Ahmad Ajibah a  recueilli plusieurs définitions de la religion qu'il  a  scindées en trois groupes, en fonction de la méthode utilisée  dans la  définition. Dans chacun de ces groupes il a placé  plusieurs définitions. Nous n'en  choisirons qu’une dans  chaque groupe parce que notre objectif  est de témoigner et d'exposer  et non pas  de débattre et de polémiquer.


La première définition est celle de  la voie ésotérique : «(la religion est) l' ensemble des devoirs de la créature vis-à-vis du Créateur, des  devoirs respectifs  de l’homme envers Allah,  envers le  groupe et envers lui-même ».

La seconde  définition  fait partie de celles qui reposent  sur le facteur  conjecturel :« (la religion est) une réaction  défensive à travers  laquelle la nature humaine résiste à ce qui préoccupe  son   esprit  et   pourrait  alors  paralyser les forces de l’individu  et   porter atteinte  à la cohésion de la société ».

La troisième définition est l'une de celles que propose la méthode comparative :«(la religion est) l’orientation du  comportement  d'un individu, en fonction de ses sentiments, vers une relation entre  son  esprit  et un esprit mystérieux qu'il  reconnaît exercer un  pouvoir  sur  lui  et sur  le monde entier et avec lequel  il  lui est agréable  d'être en contact »[8].


On constate, en examinant ces définitions singulières, une parfaite divergence entre elles. Cela relève de  la diversité des religions des  auteurs de ces définitions, de la  multiplicité  de leurs écoles spirituelles, de leurs cultures et de leurs civilisations -  grecque, romaine, chrétienne, ou reposant sur des philosophies nouvelles - si bien qu’un accord sur une définition consensuelle a été impossible à trouver. C'est pourquoi James Fraser  a dit :                   « Aucun autre sujet au monde  n'a  fort probablement  suscité  autant de divergences d’opinions que celui  relatif à  la nature de la religion » [9].


Le professeur Muhammad ،Abd Allah Dirâz a rapporté,  dans son livre Ad-dîn,  un ensemble de définitions de la religion. Il étudia  les divers éléments  constitutifs de toutes ces définitions  pour  produire  alors  une  définition  parfaite  qui est la suivante : « La religion est la croyance en l'existence d'un ou de plusieurs êtres  invisibles, supérieurs, qui ont  des sentiments,  choisissent, agissent et gèrent les affaires concernant l’être humain. Cette  croyance est  en mesure de pousser les hommes à avoir des conversations secrètes avec ces êtres suprêmes supérieurs dans l’espérance, la crainte, l’humilité et la glorification» [10].  En termes beaucoup plus concis : «  C’est la foi en un Être divin digne d’être obéi et adoré. » Cette définition est valable si l’on envisage  la religion comme un état psychologique signifiant religiosité ; mais si on la considère en tant que réalité extérieure à la psychologie, nous dirons alors que : « ( la religion est)  l' ensemble des  codes théoriques qui déterminent les attributs de cet Être divin, et l' ensemble des  règles précises   qui  modèlent  la  manière de l'adorer» [11].

 

Ra'ouf Chiblî estime, quant à lui, que les divergences sur la définition de la religion ont pour origine :

- la multitude  de points obscurs concernant  les religions héritées des peuples païens anciens.

- l’absence de textes qui expliquent le concept de  religion  dans les livres religieux anciens des Occidentaux.

- le manque de clarté, dans l'esprit des Occidentaux, des croyances dont ils ont héritées.

- l’imperfection des postulats rationnels que les Occidentaux  ont établis pour débattre  de la religion et de la religiosité.

- la perversion des critères scientifiques que les Occidentaux ont établis pour expliquer la religion[12].

On peut également ajouter à cela :

- l'ignorance  qu'ont les Occidentaux  de la religion authentique, ce qui explique que leurs définitions soient directement inspirées de leurs propres religions.

- l'absence de  distinction qu'établissent  les Occidentaux  entre la  Religion   Révélée et  les religions  positivistes  fondées  par les hommes.


Quand on  compare les définitions de la religion établies par les Occidentaux avec celles établies par les oulémas  de l’Islam, on comprend en fait  que chaque groupe définit ce qu’il connaît et ce à quoi il est habitué. Ainsi  l'ouléma musulman  établit une définition  de la religion qui est  celle  de  la  Religion  authentique Révélée par Allah. Elle porte  donc la marque de la  foi qu'il a en cette Religion  et celle  de sa familiarité avec elle ; tandis que l'érudit  occidental,  qui ne jouit pas de la connaissance de la Religion authentique, mais oscille  entre les philosophies humaines et la religion falsifiée, établit quant à lui  une définition  de  quelque chose qu’il est  incapable de comprendre et en laquelle, en outre,  il n'a pas foi.



[1] polysémique en langue arabe ; d'autre part le terme ad-dîn ne  porte pas le sens que religion porte en français , soit  'relier' ( NdT).

[2]  Al qâmous al mouhît, 1/1546  et Mukhtâr as-sihâh, 1/99.

[3] Al mufradât, p 175.

[4] Al qâmous al mouhît, 1/1546.

[5] Ad-dîn, p. 33.

[6] Cf. At-ta،rîfât, 1/344 ; Abjâd al ،uloum,  2/337 ; Hawâchî  ach-charwânî, 1/21.

[7]  Dictionnaire des sciences sociales, p. 270.

[8]  Dirâsât fî  al adyân al wathniyyah al qadîmah,  pp. 21-27.

[9]  Al ghusn  adh-dhahabî /Le Rameau d'or,  p 217.

 [10] Ad-dîn, p. 52.

[11] Ibid., p 52.

[12] Yâ Ahl al Kitâb, p. 48, rapporté de Dirâsât  fî al adyân al wathniyyah al qadîmah, p. 31.

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