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Sixième déterminant: Les qualités morales (al akhlâq)
Définition du terme: Akhlâq est le pluriel du mot kholoq qui désigne en arabe aussi bien le caractère que la disposition naturelle ou la conduite morale. Al Jawharî dit : « Al kholoq c’est as-sajiyyah (le caractère/la disposition naturelle) . On dit en arabe :"khâlis al mo'min wa khâliq al fâjir ", soit : " Conduis-toi loyalement avec le croyant, suscite chez le licencieux une bonne conduite"[1] Ou encore:"folân yatakhalliq bighayr kholqihi", soit : " la façon dont se conduit untel ne correspond pas à son caractère naturel. " Le poète dit : " Sous la constitution la disposition naturelle».
Az-Zobaydî dit : « Al kholoq désigne as-sajiyyah, qui désigne la disposition naturelle et le caractère. C’est pourquoi ،Â'ichah –qu'Allah soit satisfait d'elle –dit dans un de ses Hadiths et en parlant du Prophète r: "Son caractère était le Coran", soit : le Prophète Muhammad r était profondément attaché au Coran, à ses règles morales, au respect de ses prescriptions et de ses proscriptions ainsi qu'aux vertus, mérites et bienfaits qu'il renferme. Ibn al ،Arabî a dit : " Al kholoq désigne al morou' ah [soit: la grandeur d’âme] et al kholoq désigne aussi la religion. "Nous lisons dans le Coran : [Et tu es, certes, d'un caractère élevé [ou : d’une moralité éminente ]] (Sourate La Plume, Al Qalam, 68, Verset 4). Le pluriel de kholoq, soit akhlâq, ne recouvre pas un autre sens. Dans un Hadith, le Prophète r dit : " Rien ne pèse plus dans la balance [des œuvres salutaires] que l'excellence du caractère"Le caractère correspond, en vérité, à la forme intérieure de l'être, soit son âme avec ses qualités et ses sentiments propres, et l' âme est, pour cet forme intérieure, ce qu'est la constitution physique pour la forme extérieure de l'être avec aussi ses caractères. Ces formes, intérieure et extérieure, possèdent toutes deux de bonnes et de mauvaises qualités. Cependant la récompense et le châtiment sont davantage reliés aux qualités de la forme intérieure qu’à celles de la forme extérieure. C'est pourquoi nombreux sont les Hadiths qui font l’éloge de la haute moralité et du bon caractère » Ensuite Az-Zobaydî cite des Hadiths qui font cet éloge puis précise : « Il existe de même de nombreux Hadiths dénonçant la moralité et le caractère déplorables» [2].
Les dispositions du caractère constituent donc la forme intérieure de l'être humain qui donne à la forme extérieure de celui-ci sa beauté ou sa laideur. La législation islamique a d'ailleurs accordé à ces dispositions une attention suprême considéré l'importance qu'elles ont. C’est ainsi qu’elle a explicité les fondements des dispositions du caractère vertueuses, les origines des dispositions immorales et les conséquences de chacune de ces dispositions. Les Textes qui traitent de ce thème des dispositions du caractère étant fort nombreux, je n'aborderai point ceux qui exhortent à l'observation des conduites vertueuses ou mettent en garde contre l'observation des conduites immorales. Je mentionnerai simplement les Textes qui témoignent de l'excellence des conduites morales ou ceux qui mettent en garde contre l'amoralité des conduites.
Précisons tout d'abord que les conduites morales constituent, dans l’Islam, un principe et un dogme immuable et non substituable, que celui qui se trouve en face de nous soit un ami ou un ennemi, un proche parent ou une personne éloignée, et que l'on soit, comme musulman, victorieux ou vaincu. Les dispositions morales sont, au sein de nombre de communautés, fonction des intérêts de celles-ci ; ainsi, si l’individu ou l’État trouvent un intérêt à être sincères, ils font marque de bonne foi, mais si le mensonge leur permet d'obtenir quelque gain ou de réaliser quelque profit, alors ils l'utilisent à cet escient. Mais combien le mensonge est déplorable ! Si l'on observe nombre de politiques internationales actuelles l'on constate que ce sont des politiques amorales ou immorales. Ce ne sont que des politiques d'intérêts et non de principes, alors que l'aspect moral est l'un des composants les plus caractéristiques du Message Ultime, soit de l’Islam. C’est pourquoi le Prophète r a dit : « Je n’ai été envoyé que pour parfaire la haute moralité»[3]. Le Prophète r a exigé le respect de ce principe qui n'est pas une simple formule. Lorsqu’Abou Dhâr, qui n'avait pas encore embrassé l'Islam, apprit l’avènement du Prophète r, il enjoignit ce qui suit à son frère : « Enfourche ta monture et rends-toi dans cette vallée pour écouter ce qu'il dit ! » A son retour, le frère d' Abou Dhâr dit alors: «Je l’ai vu enjoindre le respect des qualités morales» [4] Or ces qualités morales sont notamment celles que mentionne le Très –Haut dans ces Versets : [Sois indulgent, ordonne le convenable et écarte-toi des ignorants. Et si jamais une tentation du Démon t'incite au mal, cherche refuge auprès d’Allah. Il est Celui Qui entend et sait tout] (Sourate Les Murailles, Al A،râf, 7, Versets 199-200) et [(…) ceux qui contiennent leur ressentiment et pardonnent à autrui - Allah aime sans conteste les bel-agissants] (Sourate La Famille de cImrân, Âl cImrân, 3, Verset 134). Méditez donc la dimension sociale et morale de ce Hadith du Prophète: « N' enviez pas votre coreligionnaire, ne simulez pas, à son détriment, de surenchère, ne marquez pas d'aversion à son égard, ne lui tournez pas le dos, ne mettez pas en vente une marchandise qu'il vend déjà, dans l'intention de le supplanter sur le marché ; comportez-vous, serviteurs d’Allah, comme des frères. Le Musulman est le frère du Musulman, il ne commet à l' égard de son coreligionnaire ni injustice ni trahison, ni affront. La piété est ici ( il indiqua alors sa poitrine à trois reprises ); le seul fait qu'un musulman méprise son frère est déjà un mal. Le sang, les biens et l'honneur de chaque Musulman sont sacrés pour tout autre Musulman »[5].
Le Prophète r était d'ailleurs le premier à observer et respecter cette conduite morale qu'il prônait. C’est pourquoi son épouse, ،Â'ichah la mère des croyants – qu'Allah soit satisfait d'elle - répondit à Sa،ad bin Hichâm bin ،Âmir, lorsque celui-ci l'interrogea au sujet de ce qu'avait été le caractère du Messager r : " Son caractère était le Coran. Ne lis-tu donc pas le Coran et cette Parole d’Allah : [Et tu es certes d’un caractère élevé [ ou : d'une moralité éminente] (Sourate La Plume, Al Qalam, 68, Verset 4) ? » Le Prophète r se conformait aux injonctions du Coran, n'outrepassait point ses interdits, respectait ses restrictions, avait foi dans toutes les informations qu'il contient, se soumettait et soumettait ceux qui était sous sa responsabilité à ses lois. Sa vie était ainsi une application vivante de ces principes qu’il prônait et à l'observation desquels il conviait autrui. ،Abd Allah bin ،Âmr rapporte: « Le Prophète r n’était pas impudent et jamais ne voulut paraître tel. Les meilleurs d’entre vous, disait-il, sont ceux qui ont la plus haute moralité» [6].
Le Prophète r ne considérait pas que la conduite morale qu'il observait, et à l' observance de laquelle il conviait, était réservée à ses proches ou à ceux qui suivaient sa Religion ou encore aux seuls Arabes. Il considérait en vérité qu' elle devait être adoptée par l'ensemble des êtres humains, qu'ils fussent pieux ou licencieux, croyants ou dénégateurs, proches ou lointains. C’est pourquoi le Messager d'Allah r fit cette recommandation laconique à Mu، adh lorsqu'il l' envoya au Yémen: «Crains respectueusement Allah où que tu te trouves, fais suivre une mauvaise action d'une action salutaire qui effacera la première et comporte-toi de manière exemplaire avec autrui»[7] Il nous faut considérer cette recommandation comme une ligne de conduite générale à observer tout au long de la vie. En disant: " Crains respectueusement Allah où que tu te trouves ", le Prophète r esquisse ainsi au Musulman la nature de sa relation avec son Seigneur en toutes circonstances. Puis quand il dit :" Fais suivre une mauvaise action d'une action salutaire qui effacera la première", le Prophète r montre alors au Musulman comment se comporter avec cette âme qu’il a en lui, comment corriger les erreurs de celle-ci et redresser sa ligne de conduite. Enfin quand il dit : " Comporte-toi de manière exemplaire avec autrui ", le Prophète r prescrit au croyant la conduite qu'il doit adopter dans les relations humaines et qui est inspirée par le Très-Haut. Ces relations doivent être ainsi être commandées par un comportement vertueux et non pas soumises aux inclinations capricieuses des âmes ou aux intérêts personnels des individus. Le Tout-Puissant enjoint, attestant de cette généralité dans la ligne de conduite à observer avec autrui : [(…) Tenez à autrui un langage de bonté ] (Sourate La Vache, Al Baqarah, 2, Verset 83). Généraliser cette conduite dans les relations avec tous les êtres humains quels qu'ils soient, suppose bien évidemment une généralisation de cette même conduite avec tous les genres de créatures avec lesquelles nous pouvons être amenés à être en relation. L’individu doit ainsi se comporter de la meilleure manière avec tous les êtres humains. Pour savoir ce qu’est une conduitevertueuse, prenons connaissance d'un Hadith rapporté par An-Nawâs bin Sam‘ân al Ansârî. Ainsi, quand ce dernier interrogea le Messager d’Allah r sur la piété et le péché, il reçut de celui-ci la réponse suivante :« La piété c’est la conduite vertueuse et le péché c’est ce qui reste hésitant dans ton cœur et que tu détesterais que les gens découvrent» [8] Le Prophète définit donc la piété comme étant la conduite vertueuse. As-Sudî dit : « La piété est un nom générique pour toutes les formes de bien.» [9] Quiconque désire tout le bien doit donc se conduire vertueusement avec l'ensemble descréatures. L’imam Ach-Châfi،î – qu'Allah lui accorde la miséricorde – a exposé les piliers de la grandeur d'âme grâce auxquels la moralité de l’individu se redresse : « La grandeur d'âme a quatre piliers : la conduite vertueuse, la munificence, l'humilité et la dévotion» [10].
Se comporter de la meilleure manière avec l'ensemble des créatures peut ne pas être à la portée de toutes les âmes. C’est pourquoi Allah réserve à la conduite vertueuse la récompense la plus grandiose. Le Messager a par ailleurs expliqué que l’être humain dont la foi était la plus parfaite était celui qui avait la plus haute moralité. Abou Sa،îd Al Khudrî rapporte que le Messager d’Allah r proclama: «Les croyants dont la foi atteint le niveau de la perfection sont ceux qui ont la plus haute moralité, qui font montre des plus douces attentions, qui offrent une bonne compagnie et bénéficient d’une bonne compagnie»[11].
Le Prophète annonça en outre aux Musulmans dont la conduite morale était exemplaire, sachant qu'ils se réjouiraient de cette annonce, qu'au Jour du Jugement Dernier c'est cette conduite vertueuse qui aura le plus de poids dans la balance de leurs œuvres salutaires. Abou ad-Dardâ' rapporte ainsi avoir entendu le Prophète dire: « Aucune chose plus pesante par sa valeur que ne l'est la conduite morale exemplaire ne sera déposée sur le plateau de la balance des œuvres. Celui dont la conduite morale est exemplaire atteindra, grâce à cette conduite, le rang de celui qui observe le jeûne rituel et accomplit la prière rituelle»[12].Le Prophète r accordait une importance si considérable à la conduite vertueuse qu’il dit un jour à son épouse Um Salama :« La conduite morale exemplaire emporte avec elle le bien de la vie ici-bas et celui de l’Au-delà»[13] Si tout le bien d'ici-bas et de l'Au-delà est emporté par la conduite morale exemplaire, que reste-t-il alors pour les autres œuvres salutaires ?! Il est vrai que toute œuvre bonne et bénie et dans l'accomplissement de laquelle le droit d’Allah ou les droits des créatures sont respectés, est de toute manière érigée sur une conduite morale exemplaire.
Ces mérites et ces récompenses ne sont pas les seules conséquences positives de toute conduite vertueuse. En effet le Prophète a mentionné que la personne qui se sera conduite vertueusement ici-bas sera la plus proche de lui le Jour du Jugement. ،Abd Allah bin ،Âmr rapporte ainsi que l'Envoyé d’Allah déclara un jour aux membres réunis autour de lui: «Ne voudriez-vous point savoir quel est celui d'entre vous que j'aime le plus et qui se retrouvera le plus près de moi le Jour du Jugement ? » Il réitéra trois fois cette question. Ils répondirent : « Si, ô Envoyé d’Allah ! » Il dit alors: « C’est celui d'entre vous dont la conduite est la plus vertueuse» [14].
Il ne nous est pas possible de cerner la totalité des Versets ni l'ensemble des Hadiths qui abordent l'une ou l'autre des conduites morales et exhortent à leur observation ou qui évoquent l'une ou l'autre des conduites détestables et mettent en garde contre leur adoption. Quiconque en tout cas réfléchit sur ces Textes remarque qu’ils mettent l’accent sur les fondements des conduites vertueuses comme la pudeur, la générosité, la sincérité, le courage, la chasteté, la justice et la patience, et qu' ils exposent les origines des conduites pernicieuses telles que le mensonge, l’avarice, la jalousie, l'arrogance, l'hypocrisie, la fraude, la médisance et la calomnie. Si l'étude présente ne pourra jamais contenir les preuves que renferment le Coran et les Hadiths relatives à chacune des conduites en question tant celles-ci sont innombrables, ce que nous avons mentionné est fort probablement suffisant en ce sens que nous avons clairement exposer l’importance des qualités morales dans l'Islam, préciser le rang qu'occupera le Jour du Jugement Dernier celui qui les possède ainsi que le mérite de celui qui observe une conduite morale exemplaire dans la vie ici-bas et dans l'Au-delà.
Septième déterminant : La propreté
Définition du terme propreté /nazâfah: Il est dit dans Al qâmous al muhît:« La propreté c'est la pureté/limpidité /netteté» [15].
Ibn Manzour dit : « La propreté/nazâfah c’est la pureté ; le terme nazâfah est la racine du mot tanzîf’, qui signifie "nettoyage, purification " ; il est dérivé de nazofa, qui signifie: être propre/net, duquel terme dérive le verbe transitif nazzafa qui signifie nettoyer, soit : rendre pur ».
La propreté, dans cette religion admirable, concerne tout ce qui touche à la vie, que ce soit la propreté du corps et la pureté de l'âme, la propreté dans la parole et dans l'action, la propreté dans la nutrition, dans l’habillement et la boisson, la propreté du quartier et de la rue,la propreté concrète et la propreté intangible. L'élément majeur dont Allah a enjoint formellement à Ses serviteurs de se purifier est l' associatrie. Le Tout-Puissant dit: [Ô toi, couvert d'un manteau ! Lève-toi et donne l'alarme ! La grandeur de ton Seigneur, glorifie! Tes vêtements, purifie ! Toute souillure, fuis !] (Sourate Le Revêtu d’un manteau, Al Muddaththir, 74, Versets 1-5).
Dans ces Versets, qui comptent d’ailleurs au nombre des premiers Révélés au Messager r, Allah Le Très- Haut Le Tout-Puissant ordonne à celui-ci de purifier ses vêtements des impuretés, de purifier son cœur de l'associatrie, de s'écarter résolument de tout facteur et de toute voie qui conduisent à celle-ci, et de vouer foncièrement son œuvre à Allah, Seigneur des mondes. Ibn Jarîr – qu'Allah lui accorde la miséricorde – dit : « Les exégètes du Coran émettent des avis divergents sur l' interprétation de cette Parole d'Allah: [ Tes vêtements, purifie]. Certains disent ainsi qu’elle signifie : " Ne revêts pas tes habits s'ils sont issus du péché et de la perfidie. Cette interprétation est fournie par Ibn Abbâs – qu'Allah lui accorde la miséricorde- qui rapporte le propos suivant d' Ikrimah: " Un homme se présenta au Prophète r alors que j'étais assis à ses côtés et demanda: ' Comment interprètes-tu cette Parole d’Allah : [ Tes vêtements, purifie ]? ' Le Prophète répondit: ' Ne revêts pas tes habits s'ils sont issus du péché et de la perfidie '. Puis il ajouta : ' N’as-tu pas entendu ces vers de Ghaylân bin Salamah ath-Thaqafî :
Moi, par la grâce d’Allah, jamais de tenue dépravée
N'ai porté et jamais de perfidie ne fut mon habit
Pour d’autres la signification de ce Verset serait la suivante : ne revêts pas d'habits obtenus par des gains illicites ! Pour d'autres encore le Verset signifierait plutôt: assainis tes œuvres!»[16]. Quoiqu'il en soit, les diverses interprétations des exégètes relatives à ces Versets comportent toutes l'injonction de nettoyer et de purifier l'apparence extérieure aussi bien que l'intérieur de soi.
Ibn Hajar – qu'Allah lui accorde la miséricorde – dit que l'injonction du Verset : [ (…) La grandeur de ton Seigneur, glorifie ! ] signifie : célèbre la magnificence de ton Seigneur ! Il dit également qu'il s'agit dans : [(…) Tes vêtements, purifie!] de purifier les vêtements des saletés et malpropretés. " Les vêtements" désignent selon lui l’âme et la purification de celle-ci consiste alors à éviter les manquements ; quant aux souillures évoquées dans [ (…) Toute souillure, fuis !] elles désignent les idoles[17].
Al Mobârakfourî dit que:[ (…) La grandeur de ton Seigneur, glorifie ! ] signifie : exalte la magnificence de ton Seigneur pour le porter au-dessus de ce que disent les idolâtres, et que la purification enjointe dans : [(…) Tes vêtements, purifie !] concerne les souillures diverses contre lesquelles les associateurs ne cherchaient point à se prémunir. Il fut alors enjoint au Prophète r de protéger ses vêtements contre les impuretés et les salissures, ce que ne faisaient pas les associateurs. [(…) Toute souillure, fuis!] signifie : renonce aux idoles et ne t'en approche point [18].
L'injonction faite au Musulman de veiller à sa propreté et de se purifier de l'associatrie est certes capitale mais toutefois insuffisante car en réalité il faut que celui-ci se purifie de toutes les formes de péchés et de toutes leurs conséquences. C'est pourquoi Allah a prescrit les cinq prières rituelles et les ablutions à effectuer avant chacune de ces prières pour que le Musulman se purifie réellement et quotidiennement de ses péchés. Abou Hurayrah rapporte que le Messager d’Allah déclara: « Lorsque le fidèle Musulman, serviteur d'Allah, faisant ses ablutions, lave son visage, l'eau qu'il utilise à cet escient, ne serait-ce que la dernière goutte, absorbe tous les péchés que ses deux yeux ont pu commettre. Lorsqu’il lave ses deux mains, l'eau qu'il utilise à cet escient, ne serait-ce que la dernière goutte, absorbe tous les péchés que ses mains ont pu commettre avec violence. Lorsqu’il lave ses deux pieds, l'eau qu'il utilise à cet escient, ne serait-ce que la dernière goutte, absorbe tous les péchés que ses pieds ont pu commettre, si fait qu'à la fin de ses ablutions il se retrouve purifié de tous ses péchés » [19].
Comme l'on sait qu'on été prescrites les ablutions avant l'accomplissement de la prière rituelle, l'on sait également que celles-ci doivent être précédées du nettoyage des orifices naturels si le Musulman a fait ses besoins. C'est pourquoi Allah fait l’éloge des Musulmans qui prennent très à cœur l'acte de purification :[(…) Une mosquée fondée, dès le premier jour, sur la crainte révérencielle d'Allah est plus digne de ta présence. On y trouve des hommes qui aiment à se purifier. Or Allah aime ceux qui se purifient] (Sourate Le Repentir, At-Tawbah, 9, Verset 108). Ibn Jarîr – qu'Allah lui accorde la miséricorde – a dit : « Ils aiment nettoyer leurs orifices naturels avec de l’eau après qu'ils finissent leurs besoins» [20].
Le Prophète r mit également en garde contre toute négligence concernant la miction. Il est en effet impératif de se purifier après celle-ci. Le Prophète r précisa d'ailleurs que cette négligence était la cause majeure du châtiment que subissent les morts dans la tombe. Ibn Abbâs rapporte qu’en passant auprès de deux tombes, le Prophète r déclara : « Les deux morts enterrés ici sont en train d'être châtiés et cependant point pour des raisons graves ; l’un d’eux ne se préservait point des projections d'urine pendant la miction et l’autre colportait des médisances»[21].
Le Très-Haut a prescrit en outre la prière rituelle du vendredi comme acte de purification hebdomadaire qui doit être impérativement precede d'une purification corporelle à laquelle bain, parfum et huiles de beauté contribuent. Salmân al Fârisî rapporte que le Messager d’Allah r déclara :«Celui qui, le vendredi, aura pris un bain, se sera autant que possible purifié, aura ensuite huilé ou parfumé son corps avant de se rendre à la mosquée, qui plus est assez tôt pour ne pas avoir à se glisser entre deux fidèles, aura accompli la prière surérogatoire et gardé le silence pendant le sermon de l'imam, saura qu' Allah absoudra les péchés qu’il aura pu commettre entre le vendredi précédent et l'actuel»[22]. Ainsi Allah purifie-t-il de ses péchés et de ses fautes – pour autant qu'ils ne soient pas graves - commis pendant la semaine ou les dix jours précédent le vendredi en question, celui qui cherche à se rapprocher de Lui par le biais de ce rituel sublime d' adoration. Le Prophète r a dit : « Celui qui accomplit les ablutions de la meilleure façon, puis se rend à l’office du vendredi, écoute le sermon en observant le silence, doit savoir que les péchés qu’il aura éventuellement commis pendant la semaine, ou les dix jours précédents ce vendredi là, seront absous par Allah»[23].
Le Tout-Puissant a également prescrit le jeûne rituel du mois de ramadan comme acte de purification annuelle. Abou Hurayrah rapporte que le Messager d’Allah r déclara : « Celui qui, pendant la nuit du destin (laylah al qadr), reste debout à adorer Allah, avec une foi absolue et l'espoir d’une récompense divine, obtiendra le pardon pour toutes ses fautes passées. Celui qui jeûnera pendant le mois de ramadan avec une foi absolue et dans l'espoir d' une récompense divine obtiendra le pardon pour toutes ses fautes passées»[24].
Allah Le Très-Haut a en outre prescrit au Musulman le pèlerinage mineur (le ،umrah) et le pèlerinage majeur (le hadjdj) qu'il doit accomplir au moins une fois dans sa vie afin d'être purifié de la totalité de ses péchés et de revenir de ces deux pèlerinages-à condition toutefois de les avoir accomplis correctement-aussi pur que le jour où sa mère le mit au monde. D’après Abou Hurayrah , l’Envoyé d’Allah r déclara : « Deux pèlerinages mineurs consécutifs effacent les péchés commis pendant leur intervalle par celui qui les accomplit ; le pèlerinage majeur(le hadjdj) pieusement accompli aura comme récompense le Paradis»[25] Le Prophète dit également : «Celui qui aura effectué le pèlerinage majeur sans commettre pendant son accomplissement d’actes impudiques ou licencieux reviendra de ce pèlerinage tel qu’il était le jour où sa mère le mit au monde » [26].
Si Le Sage Législateur a prescrit ces actes d'adoration que sont la prière, le jeûne et les deux pèlerinages, mineur et majeur, outre d'autres actes d'adoration, dans l'objectif de purifier de ses péchés et de ses fautes le cœur du fidèle, Il a prescrit également des actes d’adoration en rapport avec la propreté corporelle extérieure de manière à ce qu'il y ait adéquation entre pureté intérieure et propreté apparente. Ces actes d'adoration comprennent notamment les ablutions qui doivent être faites avant chaque prière, le bain obligatoire après que le corps ait été touché par une impureté majeure[27], le bain obligatoire avant la prière du vendredi. Prendre soin de son apparence extérieure, par exemple en coupant régulièrement ses ongles, ou en accomplissant toute autre pratique inhérente à la nature humaine constituent aussi des actes d'adoration. Le Prophète r a declare à ce sujet:« Cinq pratiques sont foncièrement naturelles : la circoncision, le rasage du pubis, l'épilation des aisselles, le limage des ongles et le taillage de la moustache »[28].
Murâd Hufman, ambassadeur de l’Allemagne au Maroc, déclara, après qu'il eut passé en revue quelques uns des motifs de la purification et de la propreté dans l’Islam:« Je peux affirmer, en toute sincérité, qu'il m'arrive très souvent d'être gêné par l'odeur des gens qui s’asseyent auprès de moi au théâtre de l’Opéra de Paris, ou au Centre Lincoln de New-York ou encore au théâtre National de Munich. Cependant je n’ai jamais été gêné par quelque mauvaise odeur que ce soit dans une mosquée » Puis il posa cette question:« Cela signifierait-il que les Musulmans sont plus propres ? ! » [29].
Le Prophète au noble caractère a enjoint au Musulman de veiller à la bienveillance de ses paroles, à la bienfaisance de ses actes et à la qualité de sa nourriture. Il dit ainsi :« Parfumez vos bouches avec le siwâk *, car elles sont les voies du Coran !»[30] Abou as-Sa،âdât bin al Jazarî déclare que ce Hadith signifie : «Préservez-les (vos bouches) des paroles futiles, des grossièretés, de la médisance, du commérage, du mensonge, et de tout ce qui ressemble à ces plaies, ainsi que de la consommation des nourritures interdites et souillées et empressez-vous de les purifier des impuretés» [31].
Cette injonction de propreté à laquelle le Musulman doit veiller ne s'arrête pas au niveau de l'apparence extérieure et de l'intérieur de l'être. Ce niveau elle le dépasse en effet pour parvenir à la propreté du langage. L'Islam recommande ainsi fermement au Musulman de choisir, quand il veut décrire la fragilité de son état psychologique, des termes qui ne témoignent pas d' une humeur pessimiste ou d'une méchanceté verbale ou effective. A cet égard le Prophète r a déclaré ceci : «Ne dites surtout pas:" mon âme est mauvaise/khabathat nafsî";dites plutôt : " mon âme a de mauvais penchants/laqasat nafsî» [32]. Ibn Abî Jamrah dit : «On retient de ce Hadith qu’il est souhaitable d’écarter de son langage les termes et les noms malsains et de ne conserver que ceux qui n'ont pas de signifiés détestables ou offensants. Même si khubth ( nom dérivé de khabuta qui signifie " être méchant " ) et laqs ( nom dérivé du verbe laqasa qui signifie " avoir un penchant ") peuvent être indistinctement utilisés pour exprimer cet état de l'âme en question, le terme khubth est particulièrement exécrable car il est employé dans d'autres contextes pour désigner des éléments bien plus graves ( comme la débauche et la fourberie) contrairement au terme laqs qui n'a qu'un seul autre sens que celui qu'il recouvre dans le Hadith, soit " se remplir la panse ". Ce Hadith nous fait également comprendre que l’individu doit rechercher le bien, même le bon présage, introduire le bien dans son âme, ne serait-ce qu'en proportion réduite, chasser le mal de celle-ci autant que faire se peut, rompre tout lien avec les mauvaises gens, et même cesser d'utiliser les termes que l'on retrouve également dans leur langage. Ajoutons que l'individu en position de vulnérabilité ne doit pas dire, quand il est questionné sur son état : "Je ne suis pas bon ", mais : "Je suis affaibli". Il ne doit pas soustraire sa personne du nombre des bonnes gens pour l’ajouter au nombre des malfaisants» [33].
En outre, cette injonction de propreté passe du soin que doit prendre l'individu musulman de sa propreté personnelle à l'ordre de préserver la propreté des espaces publics. Le Prophète bienveillant r conseille en effet vivement de veiller à la propreté du quartier quand il dit : « Allah est Bon et aime la bonté, Il est Propre et aime la propreté, Il est Généreux et aime la générosité, Il est Bienfaiteur et aime la bienfaisance; aussi, nettoyez vos patios (…)» [34]. At-Taybî déclare : « Si cela est établi, alors embellissez tout ce qu’il est possible d’embellir, nettoyez tout ce qu’il vous est possible de nettoyer facilement, jusqu’aux patios, soit les espaces à ciel ouvert devant vos maisons, lesquels sont en fait une allusion au degré extrême de la générosité et de la bienfaisance car si la cour de la maison est spacieuse, propre et agréable, alors elle attire les visiteurs et crée un mouvement permanent entre ceux qui entrent et ceux qui sortent» [35].
Voyez-vous combien la propreté dans l'Islam est systématique et absolue? Cette propreté concerne en effet aussi bien l’intérieur que l’extérieur, aussi bien le corps que l’âme, autant l’habitat que l’habillement, autant le quartier que la rue, aussi bien le vêtement que la couche où l'on dort et le mobilier. Il est une propreté quotidienne et une autre hebdomadaire…Gloire donc à Celui qui a établi cette Religion recouvrant tous les domaines essentiels à l'épanouissement vertueux de l’être humain, à l’épanouissement vertueux de la vie et des êtres vivants.
C'est ici que prend fin notre propos sur les valeurs sociales sans que nous n' ayons cependant épuisé le contenu des Textes de l'Islam – Versets coraniques et Hadiths prophétiques relatifs à ce thème. Nous considérons cependant que les indications que nous avons fournies et les allusions que nous avons faites dans cette partie aux fondements de ces valeurs conduisent vers d’autres similaires et mettent sur la voie de fondements qui leur ressemblent. Maintenant la recherche s'oriente vers une autre direction.
[1] As-sihâh fî al lughah.
[2] Tâj al ،urous.
[3] Al musnad, 2/381; Musannaf d’Ibn Abî Chaybah, 6/324 ; As-sunan al kubrâ d’Al Bayhaqî, 10/191.
[4] Sahîh Al Bukhârî, 5/2244.
[5] Sahîh Muslim, Hadith 2564, 4/1986.
[6] L'authenticité de ce Hadith est confirmée par l'ensemble des sources ; Sahîh Al Bukhârî, 3366, 3/1305 et Sahîh Muslim, Hadith 2321, 4/1810.
[7] Al musnad, 5/228 et Sunan d' At-Tirmidhî, 4/355 ; Abou ،Îsâ affirme que ce Hadith est authentique. Al mustadrak, 1/121; Al Hâkim dit : "Ce Hadith est authentique selon les conditions posées par Al Bukhârî et Muslim qui ne l'ont cependant pas mentionné dans leurs Sahîhayn." Adh-Dhahabî fait l'annotation suivante dans At-talkhîs :" Authentique selon les conditions posées par Al Bukhârî et Muslim"; Al mu،jam al kubrâ, At-Tabarânî, 20/144.
[8] Sahîh Muslim, Hadith 2553, 4/1980.
[9] Machâriq al anwâr, 1/84.
[10] As-sunan al kubrâ , Al Bayhaqî, 10/195.
[11] Al mu،jam al 'awsat, 4/357; ce Hadith est jugé authentique par Al Albânî dans As-silsilah as-sahîhah, 2/389.
[12] Sunan Abou Dâwoud, 4/253 et Sunan At-Tirmidhî, 4/363. Al Albânî juge la chaîne de rapporteurs de ce Hadith bonne dans As-silsilah as-sahîhah, 5/563.
[13] Al mu،jam al 'awsat, 3/279.
[14] Al musnad de l’imam Ahmad, 11/609 ; ce Hadith est jugé authentique par ceux qui ont annoté Al mawsou،ah al hadîthiyyah. Al Haythamî a dit dans Majma،az-zawâ'id :"Sa chaîne de rapporteurs est bonne" Rapporté également dans Sahîh Ibn Hibbân.
[15] Al qâmous al muhît, Al Fayrouzî.
[16] Tafsîr jâmi، al bayân, At-Tabarî, 29/144-146.
[17] Fath al bârî, 1/28.
[18] Tuhfah al ahwadhî, 9/172.
[19] Sahîh Muslim, Hadith 244, 1/255.
[20] Jâmi، al Bayân, 11/29.
[21] Sahîh Al Bukhârî, Hadith 215, 1/88 et Sahîh Muslim, Hadith 1, 292/240.
[22] Sahîh Al Bukhârî, Hadith 1, 868/308 et Sahîh Muslim, Hadith 850, 2/582.
[23] Al musnad al mustakhraj ، alâ Sahih Muslim, 1/296.
[24] Sahîh Al Bukhârî , Hadith 1802, 2/672 et Sahîh Muslim, 760, 1/523.
[25] Confirmé par l'ensemble des sources sur la base du Hadith rapporté par Abî Horayrah; Sahîh Al-Bukhârî , Hadith 1683, 2/629 et Sahîh Muslim, 1349, 2/983.
[26] Sahîh Al Bukhârî, Hadith 1449, 2/553.
[27] L'impureté majeure recouvre trois éléments : l'acte sexuel, les règles, les lochies (NdT).
[28] Sahîh Al Bukhârî , Hadith 5550, et Sahîh Muslim, Hadith 257, 1/221.
[29] Le voyage vers l'Islam, p. 123.
* le siwâk est un bâtonnet végétal fibreux antiseptique qui sert à nettoyer les dents sans l'usage de l'eau (NdT).
[30] Al Albânî a jugé ce Hadith authentique, voir Sahîh wa da،îf, Al Jâmi، as-saghîr, n° 3939.
[31] An-nihâyah fî gharîb al athar, 5/76-77.
[32] Sahîh Al Bukhârî , Hadith 5826, 5/2286. Sahîh Muslim, Hadith 2250, 4/1765.
[33] Fath al bârî, 10/564.
[34] Sunan At-Tirmidhî, 5/111, Al Albânî a jugé ce Hadith de bonne crédibilité.
[35] Tuhfah al ahwadhî, 8/67-68.